dimanche 27 octobre 2013

Comment développer ses pellicules noir-et-blanc?

Et si je faisais enfin ce que je promet depuis longtemps et que je vous expliquais des choses utiles? Le développement des pellicules noir et blanches, par exemple, un traitement maison simple et rapide (il me faut environ 15 min).

Attention à ne pas confondre développement et tirage, le développement sert à obtenir ses négatifs, le tirage et la mise sur papier de l'image du négatif. (De nos jours on peut se passer du tirage en scannant et en imprimant comme pour les photos numériques mais c'est pas drôle.)
C'est plus joli une fois développé quand même.

Ici je vais vous expliquer comment on passe de sa pellicules toute grise/violette sans rien, à un beau négatif transparent avec ses images en nuances de gris.

Avant toute choses, comment ça se passe?

Le développement noir et blanc est le plus simple, le plus accessible, le plus économique et surtout le plus souple (les meilleurs savent comment faire varier les contrastes, le grain et composent leur révélateur avec des produits chimiques au noms barbares chez eux. Les gens de niveau plus modeste peuvent "pousser" leur pellicule et sur-développer le négatif, bref j'y reviendrai.)

Il se passe en trois bains chimiques et c'est le même pour tout les formats (du minox au plan-film en passant par le 135 et le 120.)

¤Révélation de l'image: les sels d'argents qui on été oxydés par la lumière deviennent des cristaux d'argent noirs.
¤Rinçage
¤Fixation, qui permet au film d'être désensibilisé à la lumière.

En matériel il vous faut:
_Une montre, un chronomètre, qqchose pour mesurer le temps!
_Des petites bouteilles (moi j'ai des bouteilles de 1/2L de lait toutes propres) pour mettre vos produits réutilisables.
_Un décapsuleur (pour ouvrir la pellicule si c'est une 135.)
_Un thermomètre (en général il faut des produits à 20°C)
_Une cuve étanche à la lumière (on trouve très souvent les Paterson qui sont biens.)
_Une ou plusieurs éprouvettes graduées
_De l'eau
_Du vinaigre d'alcool
_Des gants ou des torchons parce que c'est mal de se mettre des produits chimiques partout.

En produit chimiques vous devrez investir dans:
_Un révélateur (en bouteille ou en sachet à diluer)
_Un fixateur (en bouteille ou en sachet aussi.)
A trouver sur des sites fiables comme digitphoto, caddyphoto, fotoimpex etc...

Pour les riches: un bain de rinçage et un bain mouillant, voir même une cartouche de gaz pour la conservation! (Pour conserver vos produits ils doivent éviter l'air qui oxyde et la chaleur qui accélère le processus, du coup il faut remplir ses petites bouteilles à ras bord et les mettre au frigo (et bien enlever les étiquettes!)) Perso je conserve tout au frigo: pelloches, papier, produits etc... et ça suffit.

Allez on commence!

PREMIERE ETAPE: MISE EN CUVE

Et oui il faut que vous sortiez votre film de sa cartouche et que vous l'embobiniez dans une spire autochargeante (le truc blanc) qui est avec la cuve. 




Pour cela: NOIR COMPLET!
On ne voit rien alors il faut bien disposer ses outils avant. Si vous développez du 120, il ne vous faut que votre cuve avec sa spire et votre pellicule. Si vous avez une pellicule 135 toute belle achetée, il faut que vous vous armiez un décapsuleur pour ouvrir la cartouche par le dessus. 

Vous avez accès à votre film, il faut l'enrouler dans votre spire qui en général a 3 hauteurs différentes: 
_120/220/620
_127
_135/126
C'est marqué sous la cuve avec la quantité de produit à mettre selon le film.
Avec les quantités de produit à mettre correspondantes.

Prenez votre film et votre spire dans l'autre main où vous mettez vos deux doigts sur les deux plus gros crochets qui doivent êtres face à face: c'est ici que vous pouvez insérer le film sur quelques centimètres. Puis vous chargez le reste du film en faisant des va-et-viens circulaires jusqu'à ce que tout le film soit rentré. 
Vous mettez ça dans la cuve étanche à la lumière (que vous fermez!) et vous pouvez rallumer: le plus dur est fait!




DEUXIEME ETAPE: REVELATION DE L'IMAGE

Souvent on conseille de remplir la cuve d'eau et de la vider avant de commencer les bains chimiques. (surtout en 120) C'est pour enlever une couche anti-halo et pour ne pas polluer le reste des solutions même s'il paraît que ça ne change rien. (C'est très drôle, on met l'eau, on la sort immédiatement après et elle est verte fluo ou bleue!)

Là vous êtes prêt et il faut votre bouteille de révélateur à la bonne température (20°C en général)

Des révélateurs il y en a plein (D-76, ID-11, A-49, Rodinal et j'en passe), beaucoup sont identiques, les prix varient beaucoup aussi. On peut aussi le fabriquer soi-même pour les perfectionnistes.)

Vous en prenez un et vous cherchez sur la notice ou sur le net combien de temps vous devez laisser agir pour votre pellicule. (Le temps dépend de la marque des deux, de leur composition et surtout de la sensibilité de la pellicule, plus elle est sensible, plus ça va être long.)

Il est conseillé d'utiliser son révélateur dilué et non pur (pur = "stock"), cela varie d'un révélo à l'autre ça va du 1+1 (une dose de révélateur et la même quantité d'eau) jusqu'à 1+1000.
Les temps de traitements sur le produit sont donnés pour une utilisation stock, il faut les multiplier par un coefficient selon la dilution.

Par exemple j'utilise de l'Atomal-49 (qui est surement le plus économe) que je dilue en 1+1. J'utilise des pellicules Fomapan 100.
Je me reporte sur leur tableau et je vois: 6-8 min en stock à 20°C. Derrière il est marqué qu'en 1+1 je dois augmenter le temps de par un facteur 1,4.
Mon produit est neuf, passé dans un bon appareil qui donne de bonnes images, je prends 6min que je multiplie par 1,4: (6 x 1,4 = 8,4min = 8min24sec).

Pousser une pellicule?

Si je veux je peux pousser ma pellicule: ça veut dire qu'on sur développe une pellicule qui n'est pas assez exposée. Je peux utiliser une 100ISO à 200ISO ou même 400ISO selon les modèle, idem je peux sur-exposer le négatif et m'en servir comme une pelloche 50ISO. Il faut rajouter 15% de temps de développement à chaque fois qu'on double la sensibilité qu'on veut. (et inversement)

Je veux faire de ma Fomapan 100 une 400ISO (toutes les pellicules ne permettent pas de pousser jusqu'à 4fois l'exposition indiquée sur le négatif), je l'utilise comme tel et je développe 8min 24 + 15% (8min et 24 sec c'est 8,4min donc 8,4 x 1,15 = 9,66min= 9min40sec pour 200 ISO), je rajoute 15% pour aller à 400: 9,66minx1,15 = 11,11min= 11min et 7sec.)
Plus rapidement je tape sur ma calculette le temps de base (en fraction de 100 pas en seconde: 1min 30 sec = 1,5min!) et je multiplie par (1,15) autant de fois que je double la sensibilité. (Pour la diminuer je multiplie par 0,85.)

En d'autre termes je multiplie par (1.15)^n (n le nombre de sous-expositions) ou par (0,85)^n' (n' le nombre de sur-expositions).


Voilà une Fomapan 100 en forêt par temps sombre avec mon Agfa Iso Rapid. (Même si moi je suis le type entrain d'enlever une toile d'araignée de sa tête derrière le pin...) Il me fallait du 400 ISO pour le coup et comme la notice dit qu'on peut exposer de 50 à 400 sans changer le temps de développement j'ai fait comme tel. Evidemment le négatif n'est pas beau et en fait ils voulaient dire qu'on obtient quand même quelque chose d'exploitable. Vaut mieux pousser un peu plus avec la méthode au dessus.
Je met mon produit dans la cuve en actionnant le chronomètre en même temps. Je ferme de manière étanche (ma cuve a un couvercle souple alors j'appuie bien dessus pour chasser l'air) et je retourne ma cuve plusieurs fois pendant 10 secondes, je la repose en la tapant deux trois fois sur la table pour chasser les bulles d'air qui empêcherai le développement de se poursuivre de manière homogène, et je recommence toutes les 30 secondes ou toutes les minutes (chacun sa sauce). Et on ne secoue pas pour faire un milk-shake, non on retourne doucement 5-6 fois la cuve en 10 secondes et on la repose en tapotant.

Une fois fini, on vide le produit et vite: étape 3!

TROISIEME ETAPE: LE RINCAGE
Pour bien stopper l'action du révélateur, on rince le film en mettant un bain d'arrêt pendant une 30aine de secondes. Un bain d'arrêt est une solution légèrement acide (2%) et ça coûte cher pour rien alors qu'il suffit de diluer à 1+3 du vinaigre d'alcool à 8% qui coûte 40 centimes le litre dans tout les supermarchés et sert aussi pour le ménage et les cornichons.
Après ce temps on vide la cuve et on passe à l'étape 4.

QUATRIEME ETAPE: LA FIXATION
Fixer est un terme utilisé dans pas mal de domaines (photo, biologie, chimie etc...), ça consiste à conserver quelque chose dans l'état où il est de manière permanente.
Pour cela on utilise un fixateur! (Original non?)
Pour nos négatifs c'est pas le formol qui conserve les bébés dauphins dans les bocaux au musée.
Chaque marque a le sien et tous sont bons. Personnellement j'ai encore du Rapid-Fixer d'Ilford qui me sert de fixateur pour mes négatifs et mes photos papier.

Il faut suivre la notice (donc sur le mien je dois diluer à 1+9, j'en fait une bouteille d'1/2L (donc 50mL de produit pour 450mL d'eau).
Je surveille son état d'usure en notant quelle surface il a fixé et quand je m'approche du maximum je le jette. Alors il est marqué dessus combien de films 135 ou 120 il peut faire ou combien de photos 24x30 etc... bref on convertit tout comme on veut (moi je fixe des papiers de divers tailles, des négatifs de divers tailles et longueur alors je dois carrément convertir en cm²) et on voit combien d'utilisations il nous reste. Un film 135 de 36 vues a la même surface qu'un film 120.

Je respecte le temps qui ne change pas selon la pellicule: 1 à 3 minutes souvent.

CINQUIEME ETAPE: RINCAGE A L'EAU
Oui vous allez pas laisser vous négatifs dans cet état! Vous rincez votre cuve à l'eau claire 2-3 fois pendant une minute le temps que les produits chimiques résiduels sortent du film par osmose. Au dernier rinçage utilisez un bain mouillant qui coûte cher ou alors une goutte de produit vaisselle pour éviter que les poussières se collent au négatif en séchant. Ca marche aussi bien!

SIXIEME ETAPE: SECHAGE
Ouvrez la cuve, sortez votre spire et démontez la en deux. Prenez votre beau négatif qui magiquement contient de belles photos.
Faites-le sécher sur une corde à linge dans un endroit sans trop de poussières si possibles et attendez une heure ou deux.

Voilà! Il n'y a plus qu'à le découper (le 35mm en bandes de 6 vues 24x36 par convention), le 120 en 3 vues 6x6... bref vous verrez selon votre classeur ou selon votre scanner.


C'est lourd un article sans images. Ici c'est pris avec un reflex Pentax (K1000)

Maintenant, vous pouvez jeter votre révélateur (bon si vous avez mis la quantité pour un film 135, c'est prévu pour un 36 vues donc si vous avez fait un film de 12 vues 24x36 vous pouvez le réutiliser deux fois en allongeant un peu le temps du révélo puisqu'il est partiellement utilisé.)
Mais jeter où? Alors le vinaigre d'alcool et l'eau aux égouts mes les produits chimiques dans l'idéal c'est de les mettre dans un bidon et de le vider dans une décharge qui accepte les produits chimiques.

4 commentaires:

  1. Salut Pantoufle, bravo pour ton blog qui est très sympa, loin des sites spécialisés très techniques, parfois "froids". Là on sent le vécu, l'humain derrière l'ordinateur, le gars qui part faire des photos avec sa Beirette ne peut être que quelqu'un de Bon et généreux ! Faudra que je mette un lien sur mon blog vers le tien, pour le développement en particulier. Tu ne t'es pas moqué du lecteur, bravo !
    A + !
    Seb

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    1. Merci beaucoup! C'est vrai que la plupart des sites et blogs photos sont très froids, épurés et techniques, le noir et blanc n'arrangeant pas le côté formel de la chose.
      C'est sûr que je vois mal un criminel partir avec son Beirette et photographier les lieux du crime... Quoique un psychopathe,un utilisateur de Beirette, l'un comme l'autre est assez marginal.
      Et sinon oui j'essaye de faire quelque chose d'à la fois poussé mais accessible à tous, quand on débute ou est extérieur au domaine c'est vite gonflant de voir une photo légendée:
      Rolleiflex 6x6 f/11 1/125ème Rodinal 1+100 22min Ilford FP4+, papier Foma 312.

      J'essaye d'ouvrir le domaine à tous! :D (Bon beaucoup ne veulent pas entrer dans ce domaine autant ne pas le refermer!)

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  2. Salut, c'est encore moi,
    vous vous souvenez, la semaine dernière, l'épisode du Brownie de Kodak sur lequel il fallait deviner le nombre 1 pour la prise de vue,
    la Pierre de Rosette de l'argentique ?
    Je continue d'explorer votre blog,
    véritable caverne d'Ali Baba du DIY.
    J'ai le matos pour développer et tirer des films en noir & blanc,
    ça tombe bien c'est le bon post.
    Le problème c'est que cela fait une dizaine d'années que ces produits ont été achetés.
    Ne trouvant aucune date de péremption sur les bidons,
    pensez-vous qu'ils soient encore efficaces ?
    Merci,
    évidemment merci.
    Raphaël.

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  3. Tout fépend du produit mais je pense aue c'est mort. Le révélateur c'est assez risqué de le tenter, le fixateur ca vaut le coup, après tout si c'est encore un peu laiteux il faudra laisser le film plus longtemps. Perso l'Atomal devient noir et visquex apres auelaues semaines.

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Un commentaire siouplé!